Bulletin de crise : commissaires d'exposition et critiques d'art

18/04/2020

cotisations sociales
rémunération
Pendant le premier confinement, La Buse a publié plusieurs bulletins de crise sur les réseaux sociaux. En voici un.

À cheval sur plusieurs régimes (artiste-auteur⋅e, microentreprise, etc.), les commissaires d'exposition et les critiques d'art bénéficient d'un soutien très limité dans le contexte de la crise du Covid-19. Les aides proposées jusqu'ici par le gouvernement sont en total décalage avec la réalité de leurs activités, qu’il s’agisse du report des cotisations sociales et des échéances fiscales ou de l’aide du fonds de solidarité DGFiP (direction générale des Finances publiques), plafonnée à 1500€ et initialement attribuée en fonction du chiffre d'affaires de mars 2019. Le secteur culturel via le Centre national des arts plastiques (Cnap) propose quant à lui une aide calculée sur les activités commandées, annulées ou reportées depuis mars 2020, jusqu'à un mois après la fermeture des lieux (juillet-août à ce jour). Pour toute cette période, l'aide est plafonnée à 2500 euros. En outre, le secours exceptionnel du Cnap (un forfait de 1000 euros en cas de difficultés financières et sociales) n'est pas ouvert aux commissaires et critiques d'art.

D'ordinaire, le travail de ces acteurs et actrices est dépendant d'une économie fragile. Il est par ailleurs peu valorisé et à la merci de retards réguliers, de sous-rémunérations et d'impayés fréquents. Ces dérives ont déjà été signalées au ministère de la Culture et à ses institutions par différentes voix/voies du secteur : travailleur⋅ses, organisations professionnelles, collectifs et associations. De plus, il n'est pas rare que la conception, la mise en place et le suivi d'expositions, la rédaction et la promotion de textes critiques ou de traductions les accompagnant ne soient pas rémunérées. Le travail gratuit est fréquent, les sous-paiements sont légion. Aussi les activités indépendantes suivent rarement une courbe de rémunération constante : les commandes et rémunérations sont très variables d'un mois sur l'autre, les expositions et autres projets au plus long cours sont souvent payés en bloc après des mois maintenus sans ou avec un pourcentage de la rémunération finale. La proposition initiale de la DGFiP calculée sur un seul mois était donc une réponse politique équivalente à la distribution en masse de tickets de tombola. Reste à espérer que le lissage du calcul sur l'année soit mis en application rapidement. Pour ce qui est de la réponse du Cnap, qui s'avère être plus réaliste au regard du secteur, elle reste lacunaire : elle ne s'adresse pas à celles et ceux qui n'avaient pas d'activités déjà engagées alors que les commandes se font très souvent sur des échéances courtes (exemple des critiques d'art qui, comme les journalistes, reçoivent des commandes d'une semaine sur l'autre ou parfois moins). Elle ne tient pas compte des activités à l'international qui permettent pourtant couramment à ces acteurs et actrices d'accéder à une base de revenu décent. Elle s'adresse uniquement aux personnes affiliées au régime des artistes-auteur⋅e. Enfin, les mesures de la DGFiP et du Cnap ne sont pas cumulables.

A minima le gouvernement se doit d’assurer la prise en charge des cotisations sociales 2020 pour les commissaires d’exposition et les critiques, comme le propose le SNAPcgt pour les artistes-auteur⋅es. Il doit également rendre possible le cumul des aides.

Les cas de travailleurs et travailleuses ne pouvant remplir les conditions fixées étant nombreux, un revenu de remplacement sur toute la durée de suspension des activités culturelles devrait être attribué à tout⋅es les indépendant⋅es du secteur des arts visuels quel que soit leur statut. Il permettrait d'équilibrer relativement les droits en regard des intermittent⋅es du spectacle indemnisé⋅es.